Toutes les routes mènent au Mont-Saint-Michel. Depuis la construction de l’abbaye qui débute en 1023, le Rocher, situé aux confins de la Normandie et de la Bretagne, est devenu une destination de pèlerinage incontournable en France, en Europe, voire dans le monde.
Des routes que les Éditions Ouest-France et l’association des Chemins du Mont-Saint-Michel ont retracées dans Les chemins du Mont-Saint-Michel – Dix parcours vers la « Merveille de l’Occident » . On y vient depuis Amiens, Paris, Cherbourg ou même Saint-Malo. C’est ce dernier chemin, autour de la baie du Mont-Saint-Michel, que nous propose de suivre cette randonnée. Cinq jours, environ 80 kilomètres, pour découvrir cette voie de pèlerins et les milliers d’histoires qu’elle raconte des premiers rois bretons au XIXe siècle. Pour finalement atteindre l’abbaye sur le rocher, à l’occasion de son millénaire. Suivez le guide !
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Depuis la cité corsaire, le chemin suit aujourd’hui le sentier des douaniers qui offre des points de vue renouvelés sur la côte, le pays de Saint-Malo, ses plages, ses pointes et ses anses successives, et sur les espaces naturels traversés.
De Saint-Malo à Cancale
Le parcours commence par la digue le long de la Grande Plage de Saint-Malo avant d’aborder la partie du littoral découpée par les pointes qui déterminent des criques abritant de petites plages. Tout ce secteur et plus largement tout le Clos-Poulet, correspondant au pays de Saint-Malo entre l’estuaire de la Rance et la baie du Mont, a servi de modestes ports d’échouage au cours des siècles. L’arrivée des moines Malo, Colomban, Du Guesclin ou encore saint Méen illustre le lien étroit de ce secteur avec le monde celtique et plus largement anglo-saxon, et son intégration au réseau des voies de communication de l’époque.
Une vue aérienne de Saint-Malo, la merveille de la Côte d’Emeraude. © © Adobe Stock / antoine2k
Cette côte découpée, favorable aux échanges, avait aussi besoin d’être défendue contre des visiteurs hostiles, des Vikings des IXe-Xe siècles aux Anglais durant des siècles. De nombreux édifices témoignent de l’histoire de ces villes maritimes tels que le château fort de l’anse Du Guesclin édifiée dès le XIIe siècle – aujourd’hui remplacé par une forteresse du XVIIIe siècle. Quant à Cancale, son développement au XIXe siècle est marqué par la construction de deux églises dédiées à saint Méen dont la première est devenue le musée des Arts et Traditions populaires.
Le chœur de la cathédrale Saint-Vincent de Saint-Malo. © P.Lack – stock.adobe.com
Concernant le culte à saint Michel, il ne se limite pas à l’abbaye du Mont mais est également présent à l’église paroissiale de Rothéneuf (à Paramé), après la halte de Jacques Cartier avant de partir explorer l’Amérique. Les habitants de ces villages côtiers étaient pêcheurs ou laboureurs jusqu’à la fin du XIXe siècle, mais aujourd’hui les résidences secondaires et l’architecture balnéaire l’emportent.
Cancale et l’église Saint-Méen. © gimsan – stock.adobe.com
De Cancale au Mont-Dol
Cancale domine le paysage de la baie du Mont, qui se développe à ses pieds, et tout ce terroir formait au Moyen Âge une seule communauté spirituelle et économique avec l’abbaye du Mont du fait de l’importance des possessions montoises dans le secteur.
Le Mont-Saint-Michel vu depuis la baie de Cancale, avec les parcs à huîtres au premier plan. Le chemin est encore long mais on en voit déjà le bout. © © Adobe Stock / aterrom
Beaucoup d’églises comme celle de Saint-Méloir-des-Ondes ou celle de Saint-Benoît-des-Ondes proviennent de donateurs qui souhaitaient s’appuyer sur les moines du Mont pour restaurer la vie religieuse des fidèles au niveau paroissial aux XIe – XIIe siècle, dans le mouvement de réorganisation matérielle et spirituelle appelé aujourd’hui « Réforme grégorienne ». Ces villages du littoral, peuplés de pêcheurs, se sont développés grâce aux terrains gagnés sur la mer et protégés dès le XIe siècle par une digue, qui permettait une poldérisation continue et le gain de nouvelles terres agricoles. Les églises de ces nouvelles paroisses, citées au Moyen Âge, ont toutes été reconstruites au XVIIIe et au XIXe siècle et l’habitat a lui aussi été renouvelé.
Le Mont-Dol dominant le paysage. © M. Coupard – stock.adobe.com
La butte du Mont-Dol a été occupée depuis la préhistoire et le côté spectaculaire du site, dominant à 180 degrés toute la baie du Mont, a sans doute frappé les esprits. Selon une tradition locale, un culte païen de l’époque gauloise aurait été remplacé au IVe siècle par un autel en l’honneur de Mithra, avant qu’une chapelle Saint-Michel ne le supplée au haut Moyen Âge. Cette chapelle Saint-Michel existait déjà en 1158, date de la donation du site par Hugues, évêque de Dol, à l’abbaye du Mont. L’ensemble a été remanié au cours du temps, mais le panorama est impressionnant depuis le mont Dol.
Un légendaire s’y rattache aussi avec la tradition de ce que l’on pensait être l’emplacement du combat de saint Michel contre le démon. En effet, on montre encore le siège et les griffes du diable terrassé par l’archange avant d’être jeté dans le précipice et le pied de saint Michel, correspondant à l’endroit d’où il s’élançait pour rejoindre le Mont d’un seul bond ! D’après une coutume du XIXe siècle, les jeunes filles qui souhaitaient se marier dans l’année devaient mettre leur pied dans l’empreinte de saint Michel.
Du Mont-Dol à Dol-de-Bretagne, la rayonnante
Le panorama du Mont-Dol embrasse tout l’horizon et mène naturellement le miquelot (pèlerin du Mont-Saint-Michel) à rejoindre la cité médiévale de Dol, ville épiscopale placée face à l’abbaye du Mont, à son pouvoir et à son attractivité depuis plus d’un millénaire.
La façade de la cathédrale Saint-Samson de Dol-de-Bretagne. L’édifice porte le nom d’un des sept saints fondateurs de la Bretagne. © © Adobe Stock / Bernard Girardin
L’exceptionnel site naturel du Mont-Dol possède aussi des monuments à signaler. La chapelle romane Saint-Michel du prieuré a disparu en 1787. On a réutilisé ses matériaux pour construire, dans un premier temps, une tour du télégraphe Chappe, puis, en 1837, une chapelle Notre-Dame-de-l’Espérance à l’intention des marins et des agriculteurs. Quant à la tour du télégraphe, on la réutilisa pour y installer une statue de la Vierge dans le cadre de l’organisation d’un nouveau pèlerinage marial.
L’église paroissiale Saint-Pierre, située à mi-pente, dans le village lui-même, est la seule église paroissiale médiévale de ce chemin. Des peintures murales du XVe siècle ont été retrouvées au-dessus des grandes arcades de la nef avec un cycle de la Passion du côté nord et un monumental Enfer du côté sud. On peut penser qu’une scène du Jugement dernier avec saint Michel pesant les âmes occupait le mur ouest, mais les maçonneries ont été reprises au XIXe siècle. Au sommet du maître-autel du XVIIe siècle, une statue de l’archange Michel couronne la composition.
La baie axiale du chœur de la cathédrale de Dol-de-Bretagne avec ses vitraux (XIIIe siècle). © © Adobe Stock / VEOy.com
Quelques kilomètres plus au sud, la cité médiévale de Dol-de-Bretagne offre une étape riche de découvertes. La présence de deux hôtels-Dieu au Moyen Âge dans la cité reflète sans doute le passage des pèlerins et des pauvres voyageurs. Dol était jusqu’à la Révolution le siège d’un important évêché dont les biens étaient assez dispersés, tant en Bretagne qu’en Normandie, sous forme d’enclaves liées à l’histoire de l’évangélisation de saint Samson au Ve siècle. Au IXe siècle, c’est à Dol que Nominoé, roi de Bretagne, a été couronné.
La ville s’est développée autour de sa cathédrale, seule à être fortifiée dans un premier temps, mais une enceinte urbaine existait au moins dès le XIIe siècle. Dol était une place disputée qui contrôlait l’axe Normandie-Bretagne : son donjon en bois est ainsi représenté sur la tapisserie de Bayeux lors d’une expédition de Guillaume le Conquérant.
La chapelle Sainte-Anne de Saint-Broladre, le long du littoral. © © Wikimedia Commons / Ex-Smith
La ville offre encore des exemples de demeures urbaines du XIIe siècle et de commerces à arcades, construits en pierre, qui témoignent de l’importance de la cité.
La cathédrale actuelle date en grande partie du milieu du XIIIe siècle avec une élévation à trois niveaux d’inspiration normande et un chœur à chevet plat et à déambulatoire qui illustre des liens avec l’architecture anglaise de l’époque. La cathédrale de Dol propose une synthèse architecturale de différentes tendances et son modèle servira de base à l’architecture gothique en Bretagne.
De Dol-de-Bretagne au Mont
La dernière étape, de Dol au Mont, est plus originale, puisque le miquelot suit les anciennes falaises qui dominaient le marais de Dol et qui ouvrent une large perspective, avant de rejoindre la digue et le chemin littoral jusqu’au Couesnon, porte du Mont-Saint-Michel.
Le chemin s’écarte du littoral pour prendre de la hauteur sur les falaises qui dominaient l’ancien trait de côte ; l’habitat est à flanc de colline ou sur le plateau surplombant les anciens marais de Dol poldérisés dès le Moyen Âge : à l’époque, ces coteaux étaient aussi favorables à la plantation de vignes, comme à Dol.
Le parcours suivi par le pèlerin est plus physique et plus authentique avec des bourgs proches de la côte, mais tournés aussi vers les terres. Saint-Broladre était une dépendance de l’abbaye du Mont depuis les donations des deux églises et d’importants revenus, intervenus à la fin du XIe siècle. L’église actuelle de Saint-Broladre a été reconstruite à la fin du XIXe siècle.
Le pont-passerelle pour rejoindre le Mont. © Florence Piot – stock.adobe.com
Comme Saint-Broladre et Saint-Marcan, Roz-sur-Couesnon, est implanté sur la hauteur. Selon la légende, un monastère y aurait été fondé par saint Malo et il aurait été détruit par un roi breton nommé Hailoch, frappé de cécité en punition. C’était un point de passage au Moyen Âge et un petit hôpital Saint-Jean avait été établi près de la voie antique qui reliait Valognes à Rennes par Coutances. L’église paroissiale Saint-Martin implantée au sommet de la colline domine toute la baie du Mont. Les traditions locales plus ou moins légendaires rapportent aussi la disparition de villages submergés par les flots dans toute cette zone et certains font le rapprochement avec la disparition de la mythique forêt de Scissy au VIIIe siècle lors d’un raz-de-marée, mais on aborde ici le domaine de l’imaginaire collectif…
Quoi qu’il en soit, la traversée de la baie du côté ouest du Couesnon est toujours difficile et le miquelot suivra le sentier des douaniers jusqu’à la rencontre du Couesnon pour rejoindre la Merveille de l’Occident par le pont-passerelle.
Une randonnée issue d’un ouvrage des Éditions Ouest-France. © Éditions Ouest-France
Un contenu proposé par les Éditions Ouest-France.
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