Cette fois-ci, le tribunal administratif de Rennes ne leur aura pas donné raison. Saisie en référé par l’Association Pays d’émeraude mer environnement (Apeme), Sites & monuments et Eaux et rivières de Bretagne, l’institution a validé le 1er décembre un arrêté de la préfecture d’Ille-et-Vilaine autorisant l’épandage de moules de Bouchot dites « sous taille » dans la baie du Mont Saint-Michel. Des moules jugées non commercialisables, leur taille ne respectant par les exigences de l’appellation d’origine protégée (AOP).

Problème, celles-ci pourrissent à l’air libre, ce qui, selon les associations environnementales, entraîne des risques de pollution et des odeurs nauséabondes, sans compter les goélands attirés par cette nourriture gratuite. Pour la présidente de l’Apeme, Marie Feuvrier, « la décision du tribunal est une vraie déception ». « Il est étonnant de voir qu’on peut prendre le littoral pour une décharge », regrette-elle. « C’est un très gros soulagement, estime de son côté le président du Comité régional de la conchyliculture Bretagne Nord, Sylvain Cornée. Cela montre que nous ne faisons pas n’importe quoi. »

Dans la baie du Mont Saint-Michel, la question des moules sous taille n’est pas nouvelle. Chaque année, environ 20 % de la production est rejetée sur l’estran, cette partie du littoral couverte et découverte par les marées. Conscients du problème, autorités et professionnels ont identifié plusieurs filières de valorisation (agroalimentaire, alimentation animale, méthanisation…), mais aucune ne devrait être opérationnelle avant 2025. En attendant, l’épandage est « notre seule solution de repli », fait valoir Sylvain Cornée.

Appel possible d’ici deux semaines

En septembre 2022, le tribunal administratif, déjà saisi par l’Apeme et Sites & monuments, avait suspendu l’autorisation préfectorale d’épandage, celles-ci ne respectant pas plusieurs points de droit français et européen. Faute de pouvoir être rejetées sur l’estran, plus de 100 tonnes de moules ont donc été entassées dans le port du Vivier-sur-Mer (35), générant une odeur pestilentielle. Elles ont finalement été transportées par camion afin d’être enfouies.

Pour la saison 2023-2024, les mytiliculteurs sont en partie rentrés dans le rang, en menant une enquête publique et en obtenant une autorisation environnementale. C’est cette autorisation que les associations ont attaquée, en reprenant une partie des arguments de l’année précédente. Mais pour le tribunal, ils ne s’appliquent pas cette fois-ci au texte visé. À ce stade, les associations n’ont pas encore décidé si elles feraient appel. La procédure ayant été examinée en référé, elles ont 15 jours pour se prononcer et saisir le Conseil d’État d’un recours en cassation.